Des symboles ! Tous supprimés, militaires, chevaleresques ou religieux, à la Révolution comme rappelant trop le Tyran honni ; mais rapidement rétablis par Napoléon Bonaparte, qui remarque vite que si le peuple a besoin d’égalité, il a besoin aussi de distinctions pour sortir de l’anonymat les citoyens les plus remarquables. Les Français sont « amoureux des distinctions tant il est vrai que les grands principes font rarement bon ménage avec les grands sentiments et parmi ceux-ci le sens de l’honneur et de l’orgueil ! » Pierre Legendre, dans son Histoire de l’Administration (Presses universitaires de France, collection Thémis) le relevait à juste titre, tout comme certains conseillers présidentiels actuels qui ont été ses étudiants, ou au moins ses lecteurs. Des croix, des étoiles, de simples végétaux à l’instar des Grecs et des Romains, feuilles de chêne, de laurier, palmes exotiques mais tous rappelant un fort contenu de vertus civiques ou militaires. Les Grognards quittant le Camp de Boulogne à destination de ce qui allait être les champs de batailles autrichiens, défilèrent devant Napoléon en arborant au revers de leur uniforme un rameau d’arbuste ramassé sur le bord du chemin entre Elchingen et Ulm, symbole de leur victoire assurée.
L’instruction publique, dans son intégralité, fut l’objet des travaux du Premier Consul, de l’Académie aux maîtres d’écoles. « Il n’y as pas d’état politique fixe, s’il n’y a pas un corps enseignant, avec des principes fixes. Tant qu’on n’apprendra pas, dès l’enfance, s’il faut être républicain ou monarchiste, catholique ou sans religion, l’Etat ne formera point une nation. » Un peu plus tard, Jules Ferry donnait comme consigne à ses Hussards Noirs de « mettre la main sur l’âme de l’enfant », ce qu’a fort bien décrit Maurice Barrès dans « Les Déracinés ». Dès lors, Topaze, comme les autres enseignants, eut sa médaille spécifique, les Palmes Académiques.
Médaille originale puisqu’elle n’est pas composée d’un rond ou d’une croix, mais de deux palmes, trop fort n’ayant jamais manqué, alors que dans l’Antiquité, une seule suffisait pour honorer son titulaire ! En 1955, un siècle et demie après sa création, le plus ancien des ordres civils est destiné à « récompenser les services des personnes qui participent directement ou indirectement à la fonction d’enseignement et au développement des connaissances ». 35 ans d’ancienneté sont nécessaires pour la demander. Ces deux critères, ancienneté et demande, sont étrangers à toutes les conditions d’attribution des autres décorations. Il y a donc un saut qualitatif à effectuer pour obtenir la Légion d’honneur. Les services exceptionnels rendus à l’Instruction Publique ne furent pas les seuls critères d’attribution pour les enseignants. Beaucoup accomplirent leurs devoirs dans la tranchée, comme par exemple l’instituteur François-Marie Callarec, sous-lieutenant au 65ème bataillon de Tirailleurs Sénégalais, blessé une première fois à Somme-Py en Champagne en 1915, puis tué à l’ennemi en entrainant ses hommes à l’assaut à Laffaux le 16 avril 1917, qui recevra la Légion d’honneur à titre posthume avec la citation : « Officier de haute valeur morale, consciencieux et calme, modeste et brave ». Son épouse, institutrice également, recevra aussi la Légion d’honneur pour son action près des veuves et orphelins de guerre et son dévouement sans limite dans la Résistance.