L’École navale

La marine militaire n’a vraiment existé qu’à partir du ministère du cardinal de Richelieu. Son existence fut menée à terme par Colbert, mais rien n’était encore prévu pour l’éducation des officiers de mer. Sur ordre de Louis XIV, le recrutement de jeunes gentilshommes dans les compagnies de gardes de la marine n’aboutit que difficilement à un début d’instruction à terre à Toulon, Rochefort et Brest. Mais dès 1682 une frégate dans chaque port fut chargée de l’instruction à la mer. Toutefois, rien n’était régulé, chaque port, voire chaque vaisseau, appliquant à sa manière un schéma d’instruction. Cependant une école royale de marine fut ouverte en 1773 au Havre, mais fermée après deux ans d’existence. La révolution apporta son lot de perturbations dans la marine dont l’existence n’était pas reconnue.

En 1810 un décret impérial créa à Brest et Toulon une école spéciale de marine, formant en trois ans des aspirants qui devenaient enseignes quatre ans plus tard. Ces écoles furent fermées en 1816. Après une période intermédiaire qui vit un collège royal de la marine à Angoulème, une ordonnance du roi Louis-Philippe en novembre 1830 appela « Ecole navale » l’école embarquée à Brest sur l’Orion depuis 1827. Ce nom est conservé jusqu’à ce jour. Les élèves étaient désignés après examen et embarquaient chaque 15 novembre sur le vaisseau « Orion » en rade de Brest. Les cours théoriques duraient dix mois et étaient suivis de dix mois de navigation.

L’Orion, étant trop petit pour 139 élèves, fut remplacé en 1840 par le « Borda » qui servit jusqu’en 1863. Son remplaçant reprit le nom de Borda, qui devint l’appellation générique du vaisseau de l’Ecole navale. Les séjours à l’Ecole navale furent marqués par différents incidents liés particulièrement à l’indiscipline des élèves supportant difficilement le régime exigeant de l’Ecole. D’autres faits marquèrent la vie de l’Ecole, ainsi des échouages de bâtiments d’entrainement. En 1864 appareilla de Brest le premier navire d’application : le « Jean-Bart ». En 1882 la limite d’âge pour l’admission fut fixée à 18 ans. Les traditions se mettent en place petit à petit, comme la remise des sabres aux fistots par les anciens, les corvettes (sorties d’entrainement à la navigation) en été. Les instructeurs sont des professeurs civils de l’Université et des lieutenants de vaisseau. La théorie et la pratique marchent de front. Des bâtiments sont annexés à l’Ecole.

Des prix sont accordés aux élèves selon le classement général en fin d’année ou propres à une matière enseignée. Notons que le langage employé par les « bordaches » est composé de mots et d’expressions incompréhensibles pour un profane : c’est l’argot Baille.

Trois navires se sont succédés sous le nom de Borda jusqu’en 1913. En 1914, l’Ecole est transférée à terre à Laninon puis en 1936 dans des bâtiments neufs à Saint-Pierre-Quilbignon. La seconde guerre mondiale conduit à évacuer l’Ecole de Brest en 1940. Mais elle survit sous des formes multiples en France, en Grande-Bretagne et en Afrique du Nord. En 1945, l’Ecole est installée dans des locaux de la base aéronavale de Lanvéoc. Des constructions neuves viennent former progressivement l’ensemble que nous pouvons voir actuellement.

Deux siècles ont passé, mais les principes de la formation des officiers de marine sont demeurés : enseignement multidisciplinaire à terre, alliant théorie et travaux pratiques, apprentissage maritime et opérationnel au cours d’embarquements, dont une campagne d’application de longue durée. Le contenu a évolué en fonction des nouvelles techniques et l’enseignement s’est ouvert sur l’extérieur par des stages en facultés et entreprises, françaises et étrangères. Le site de Lanvéoc s’est développé vers un « campus de la Marine ».

Le drapeau de l’Ecole navale a été créé par arrêté du ministre de la Marine en date du 19 juin 1923, en remplacement du pavillon datant de l’Ecole embarquée. Le drapeau a été remis le 15 juillet 1923 par Monsieur Alexandre Millerand, président de la République. Le pavillon de l’Ecole est décoré en 1922 de la Croix de Chevalier de la Légion d’honneur et de la Croix de guerre 14-18 avec palme, décorations bien évidemment transmises au drapeau en 1923. Le drapeau a ensuite été décoré de la Croix de guerre 39-45, remise en 1951, et de la Croix de guerre des théâtres d’opérations extérieures remise en 1955.