« Dans mon pays je cultivais la terre, Dans mon pays je gardais les brebis »
Il chantait sa fierté, ce petit Belge sur les bords de l’Yser, en montrant sa boutonnière récemment ornée d’une décoration. Nombreux furent les paysans devenus militaires « pour un certain temps » et récompensés à l’instar de leurs camarades professionnels pour leur bravoure ou leur mérite. De tous les civils, requis ou mobilisés et combattant aux côtés de leurs frères d’armes de métier pour la durée d’un conflit, c’est incontestablement les « travailleurs de la terre » qui ont été les plus nombreux. Les conflits furent nombreux dans cette période qui concerne notre mémorial : les guerres de la Révolution, du Consulat et de l’Empire, celle de Napoléon III pour qui « L’Empire, c’est la Paix », les deux guerres mondiales, les conflits coloniaux.
Pourquoi ce plus grand nombre de paysans ? Tout simplement parce que la France était « paysanne » jusqu’aux guerres mondiales. Pasteur ou agriculteur, sans doute les plus vieux métiers du Monde. Notre gardien de brebis des bords de l’Yser n’eut jamais de décoration à titre civil mais bien parce qu’à un moment, il avait troqué son bâton de berger pour un fusil. « Tu gagneras ton pain à la sueur de ton front » nous dit la Bible. Ce mot magique de « pain » est indissociable de celui de paysan qui fait pousser du blé.
Tout au long de l’Histoire, l’image du monde paysan a été maltraitée, vilipendée, brocardée. Dans l’inconscient collectif, dans la littérature dès les fabliaux du Moyen Age, on ne le ménage pas. Tantôt benêt, roublard, accapareur, il est sûr qu’il doit assurer la redoutable charge de nourrir la population pendant que le noble défend théoriquement ses terres et l’ecclésiastique prie pour le salut de son âme. Croquant, manant, « Jacques », Zola sonne la charge avec « La Terre » l’accusant de tous les péchés du monde. La Bruyère, Vauban, Giono prendront cependant sa défense. Virgile leur rendait déjà hommage en ces termes : « Trop heureux les hommes des champs s’ils connaissaient leur bonheur ».
Il est sûr que c’est dans cette catégorie que l’on rencontre à la fin de la Première Guerre Mondiale le nombre le plus élevé de Grands Invalides de Guerre.
Après s’être modernisés dans les années 60 pour être en mesure de nourrir le développement de la population, on leur découvre aujourd’hui une nouvelle vertu : ils sont capables d’entretenir le paysage et la biodiversité, et même, ils peuvent produire « bio » !